Extraits de presse
Catherine Makereel, Le Soir, le mercredi 11 mai 2022
Laurence Bertels, La Libre, le vendredi 13 mai
© Lili Hiriart
Il paraît que les battements de cœur d’une mère (ou d’un père) se mettent à pulser au même rythme que les battements de cœur de son enfant quand tous les deux expérimentent le même spectacle. C’est l’artiste espagnol Carlos Laredo, spécialiste du théâtre jeune public, qui a mis au jour cette fascinante observation. L’histoire ne dit pas si c’est le cœur du parent ou celui de l’enfant qui se met au diapason, mais on est prêt à parier que, sur ce coup-là, c’est plutôt l’enfant qui donne le tempo. Car en matière d’art pour les tout-petits, les experts sont unanimes : ce qui rend si singulier les spectacles pour les tout-petits ? Ce sont les enfants qui emmènent les parents, grands-parents ou puéricultrices dans la découverte, et non l’inverse. C’est à nous, les adultes, de nous adapter à la perception d’un petit de 6 ou 18 mois, à sa façon d’appréhender le monde, non pas par le langage (qu’il ne maitrise pas encore) mais par tous les autres sens.
Se donner le temps
Pour La montagne magique, L’art et les tout-petits revêt une importance toute particulière dans la programmation car les spectacles représentent bien souvent une première fois pour les parents et les enfants. « On pose avec eux les bases de l’art vivant. C’est là par exemple que les parents comprennent qu’ils n’ont pas besoin d’expliquer aux enfants. Ils sont là pour profiter du spectacle ici et maintenant. On prend d’autant plus le temps avec les parents dont c’est pour eux une première fois. Ils sont parfois stressés et se demandent si leur enfant va se faire remarquer. Ou alors ils placent beaucoup d’attente en se disant que le spectacle va être une révélation. L’accueil de ces parents est essentiel pour nous, pour faire en sorte qu’ils arrivent à lâcher prise, à voir le spectacle simplement comme un moment pour eux et leurs enfants, dédié à leur relation. Comme ce sont des petites jauges, on peut vraiment papoter avec eux. On se donne le temps ! »
« La manière dont un tout-petit s’ouvre au monde, tente de le comprendre, c’est en le touchant, le manipulant, le reniflant », confirme Cali Kroonen, directrice de La montagne magique où se déroule actuellement le festival L’art et les tout-petits. « Il entre en contact avec le monde par les sens, contrairement à nous, adultes, qui l’appréhendons d’abord par le sens, par le cérébral. Quand on accepte d’être guidé par l’enfant et non l’inverse, on découvre un spectacle de manière plus physique ».
Face à une demande toujours plus croissante du public, La montagne magique a ajouté un quatrième week-end à sa programmation afin de satisfaire le plus grand nombre. Mais attention, pas question de faire des concessions sur la taille des jauges. « Ces spectacles jouent sur le fil délicat du sensible, sur une énergie qui change à chaque représentation. Quand l’artiste vous dit que sa pièce est pour 20 enfants, c’est tentant, en tant que programmatrice, d’en mettre 40, mais on ne le fait pas car il faut respecter cette intimité pour arriver à tendre ce fil du sensible ».
Catherine Makereel, Le Soir
Branle-bas de combat à La montagne magique le week-end dernier pour l’ouverture du festival L’art et les tout-petits.
Dès 10 heures, rue du marias, apparaissent les premières poussettes et parents prudents soucieux de laisser à l’enfant le temps de prendre la mesure de l’endroit qui leur est dédié.
Pour patienter, une installation de la Guimbarde ouvre ses voiles aux petits qui se déchaussent, referment précautionneusement les languettes de leurs baskets… Au centre de Troglodytes, deux artistes aident l’enfant à s’émanciper. Espace dédié à l’exploration, invitation à la contemplation et au plaisir des sens, loin du temps qui passe et du bruit qui sourd, cette déambulation poétique prépare, sans en avoir l’air, à la représentation théâtrale.
Les uns découvrent UP ! de LagunArte pour apprendre à s’élever jusqu’au vertige, les autres se laisseront envoûter par la poésie corporelle et musicale de Knock ! du Magnet Theatre, compagnie réputée d’Afrique du Sud, dont la grâce repose sur la présence des comédiens qui approchent la petite enfance avec finesse, éveillant leurs sens tou au long d’une journée voire d’une vie entière…
Approche plus contemporaine du côté de Cercles d’HELIOS Theater, venu d’Allemagne, avec ce sable qui fuit du seau suspendu au plafond, le mouvement de balancier de galets où semble s’écrire une histoire, les cercles, qui se dessinent et le charismatique Michael Lurse. Une demi-heure intense qui a fasciné tous les enfants assis en carré autour de la scène, une preuve, une de plus, que le théâtre pour tout-petits, à l’honneur ce mois-ci à Bruxelles comme à Charleroi, relève du grand art.
Laurence Bertels, La Libre